Entretien exclusif avec Peter Bwire « Raconter des histoires de chez soi au monde entier »

Publié le 22/12/2024 | La rédaction

France, Kenya

Peter Bwire est un cinéaste dont la passion pour la narration a fait de lui une voix incontournable dans l’industrie cinématographique africaine. Élevé à Kitale, au Kenya, il a découvert le cinéma par un chemin inattendu, poussé par son amour des histoires plutôt que par une exposition précoce au cinéma. Fondateur de la Kitale Film Week, il a travaillé sans relâche pour construire une plateforme qui promeut les histoires africaines tout en favorisant les collaborations locales et internationales. Dans cette interview, il revient sur son parcours, les défis de l’équilibre entre créativité et affaires, et sa vision de l’avenir du cinéma africain sur la scène mondiale.

Carrière et aspirations

Jombelek : Qu’est-ce qui vous a poussé à poursuivre une carrière dans l’industrie du cinéma et comment avez-vous commencé ?
Peter B. : Je n’ai pas grandi en rêvant de travailler dans l’industrie du cinéma. Enfant, à Kitale, au Kenya, j’adorais les histoires et je lisais des livres de nombreuses cultures et de nombreux pays. Mais comme je n’avais pas de télévision à la maison, je n’ai pas été exposé à des films ou à des émissions qui auraient pu m’influencer très tôt.
Au début, je pensais devenir journaliste ou travailler dans les médias. Cependant, lorsque je n’ai pas trouvé de programme universitaire dans les médias qui m’intéressait, j’ai choisi d’étudier le théâtre et le cinéma. Au cours de mes études, j’ai découvert le pouvoir du cinéma comme moyen de raconter des histoires qui pouvaient toucher des personnes de toutes les cultures et inspirer des émotions uniques.
Ce qui m’a vraiment attiré vers le cinéma, c’est ma passion pour la narration. Le cinéma est devenu le moyen idéal pour moi de donner vie à des histoires visuellement et émotionnellement, ce qui m’a incité à construire une carrière dans ce domaine.

Jombelek : Comment définissez-vous le succès en tant que jeune professionnel dans un domaine aussi compétitif ?
Peter B. : La concurrence dans l’industrie cinématographique est très forte, mais la demande est encore plus grande. Presque tout le monde cherche à se divertir, et le cinéma va au-delà du simple divertissement : il communique des idées et crée de l’art. D’une manière ou d’une autre, nous répondons à un besoin de quelqu’un, quelque part. Pour moi, le succès ne consiste pas à être au sommet de l’industrie, mais à créer de la valeur et à combler des lacunes. Je dirige un festival de cinéma et j’écris des histoires. Aucun de mes scénarios n’a encore été produit, mais je vois déjà le succès dans le fait que je les ai écrits et terminés.
Le succès, pour moi, signifie rendre la vie plus facile, plus heureuse ou plus satisfaisante pour les autres. Que ce soit par le biais de la narration, de l’organisation d’un festival ou d’autres activités liées au cinéma, mon objectif est de créer un impact et d’atteindre les gens de manière significative. C’est ainsi que je définis le succès dans ce domaine.

Jombelek : Quel a été le moment le plus déterminant de votre carrière jusqu’à présent ?
Peter B. : Le moment le plus déterminant de ma carrière a été la mise en œuvre de la deuxième édition de la Kitale Film Week. J’avais déjà organisé des événements cinématographiques et lancé des projets cinématographiques auparavant, mais aucun d’entre eux n’a dépassé la phase initiale. La Semaine du film de Kitale était différente : elle a non seulement perduré, mais a également transformé ma façon de penser le cinéma est-africain et africain dans son ensemble.
Cette expérience m’a changé personnellement, m’a ouvert les yeux sur de nouvelles façons de penser la distribution de films, de comprendre le public et de m’engager dans l’industrie cinématographique. L’organisation de cet événement à deux reprises a également aidé ma communauté à mieux comprendre le but et le potentiel du cinéma, la façon dont il peut transformer des vies et apporter des changements significatifs aux communautés. Ce fut un tournant qui a renforcé ma conviction que le cinéma a le pouvoir d’avoir un impact durable.

Jombelek : Comment conciliez-vous la créativité avec les exigences commerciales de l’industrie cinématographique ?
Peter B. : Je m’efforce de maintenir un équilibre en veillant à ce que la créativité et les aspects commerciaux soient présents dans tout ce que je fais. Pour moi, la créativité fait partie de ma vie quotidienne : parler aux gens, jouer, voyager, lire, plaisanter et assister à des événements. Ces activités nourrissent mon imagination et maintiennent mon énergie créatrice en vie. Je pratique également l’écriture régulièrement, mais je ne la force pas et ne m’en tiens pas à un emploi du temps rigide. Mon travail dans le domaine du graphisme me permet également d’expérimenter de nouvelles idées pendant des heures, ce qui renforce mes compétences créatives.
Du côté commercial, je me concentre beaucoup sur la communication : écouter, parler, lire et écrire. Ces compétences m’aident à établir et à entretenir de solides relations dans l’ensemble du secteur. Je crois que les relations sont la base de l’équilibre entre créativité et affaires. Chaque jour, j’apprends quelque chose de nouveau et je rencontre des personnes qui m’ouvrent des opportunités pour faire bouger les choses. En entretenant des relations et en restant curieux, je peux répondre aux exigences commerciales tout en restant fidèle à ma vision créative.

Travail local et international

Jombelek : Comment gérez-vous votre travail à la fois au niveau local et international dans l’industrie du cinéma ?
Peter B. : Ma priorité est toujours locale. Je crois fermement au dicton « plus vous allez au niveau local, plus vous devenez mondial », que j’ai découvert pour la première fois dans un livre de Ben Okri. Je me concentre sur le service à ma communauté locale à Kitale, où je vis, et cela suscite naturellement l’intérêt des gens d’autres régions et pays.
Chaque fois que je travaille à l’international, dans des pays comme le Royaume-Uni, la France ou le Nigéria, c’est toujours dans le but d’améliorer la valeur que je peux apporter à mon travail local. Ces expériences internationales me donnent l’occasion d’apprendre, d’améliorer mes compétences et de nouer des relations, que j’utilise ensuite pour mieux servir ma communauté.
En fin de compte, mes histoires, l’impact que je veux créer et mon dévouement sont ancrés dans mon environnement local. Bien que l’apprentissage et les connexions soient mondiaux, le cœur de mon travail reste à Kitale.

Jombelek : Quels défis avez-vous rencontrés lors de la transition entre différents marchés culturels du cinéma ?
Peter B. : Il peut être difficile de s’y retrouver sur les marchés du film, car ils impliquent des acheteurs, des vendeurs et des observateurs, chacun ayant des attentes uniques. L’un des principaux défis est la rareté des marchés du film en Afrique, qui limite les possibilités de présenter et d’échanger des films au niveau local.
Un autre problème est le coût élevé des déplacements vers ces marchés, qui se traduit souvent par une pénurie d’acheteurs. Pour les vendeurs, les dépenses élevées liées à la réalisation de films signifient qu’il y a peu de nouveaux films remarquables à présenter sur les marchés. Ces obstacles financiers font qu’il est difficile pour quelqu’un comme moi, un jeune professionnel, de se déplacer librement, d’acquérir des films ou de conclure des affaires.
De plus, les sociétés cinématographiques de la région sont petites, ce qui offre peu d’opportunités aux jeunes cadres d’acquérir de l’expérience et de se développer. Personnellement, mon expérience des marchés du film est limitée en raison de ces contraintes, mais j’apprécie l’essor du marché numérique, qui a facilité la connexion et la réalisation d’affaires sans avoir besoin de réunions physiques coûteuses.

Jombelek : Comment adaptez-vous votre vision créative pour trouver un écho auprès des publics locaux et mondiaux ?
Peter B. : Dans mes récits, je m’efforce de créer des personnages et des intrigues profondément humains et universellement identifiables. Les émotions, les désirs et les luttes sont des choses auxquelles tout le monde peut s’identifier, quelle que soit sa culture ou son origine. Je cherche à raconter des histoires qui semblent personnelles mais qui portent des thèmes qui transcendent les frontières, qu’il s’agisse d’amour, de perte, d’espoir ou de résilience.
En même temps, je fonde mes histoires sur des contextes, des traditions et des valeurs locales. En étant authentique envers ma propre culture, je crée une perspective unique qui peut intriguer le public mondial tout en trouvant un profond écho auprès des publics locaux. La clé est d’équilibrer le spécifique et l’universel, en créant des histoires qui sont à la fois ancrées dans un contexte particulier et accessibles aux personnes de tous les horizons.
Chaque histoire que je crée commence par une idée de base simple et claire que je développe avec profondeur et clarté émotionnelles. De cette façon, que le public soit local ou mondial, il peut trouver dans l’histoire quelque chose qui lui semble significatif et réel. Je recherche principalement les mêmes choses lorsque je sélectionne des œuvres pour le festival du film.

Jombelek : Pouvez-vous nous parler d’un projet où la combinaison de perspectives locales et internationales a eu un impact significatif ?
Peter B. : La Semaine du film de Kitale est un excellent exemple de combinaison de perspectives locales et internationales. Initialement axée sur la présentation de films kenyans et ougandais, l’événement s’est développé pour présenter des films de toute l’Afrique. Cette expansion a eu un impact significatif sur les artistes locaux du comté de Trans Nzoia, où se trouve Kitale, en les aidant à développer leurs compétences de narration plus rapidement et plus efficacement qu’auparavant.
La portée du festival a également eu un impact positif sur l’économie locale. Avec l’arrivée d’organisations internationales comme l’Institut français en tant que partenaires, nous avons pu proposer un plus large éventail de films africains, ce qui attire davantage de visiteurs dans la région. La collaboration avec les ambassades de France et des Pays-Bas a encore élargi le profil du festival, créant des opportunités pour les entreprises locales de bénéficier d’un tourisme accru, d’une attention médiatique et d’opportunités de réseautage.
Cette fusion de perspectives locales et internationales améliore non seulement les échanges culturels, mais stimule également l’économie locale en stimulant le tourisme, en créant des emplois et en favorisant de nouvelles opportunités pour la communauté. La Semaine du film de Kitale a prouvé à quel point le cinéma peut être un outil puissant pour la croissance culturelle et économique.

Voyages et échanges culturels

Jombelek : Comment les voyages ont-ils influencé votre approche narrative et créative au cinéma ?
Peter B. : Les voyages ont été une expérience transformatrice, qui a façonné à la fois mon approche narrative et créative. Ils ont élargi ma perspective, m’ont fait me sentir citoyen du monde et ont renforcé mon respect pour les différentes cultures. Au fil de mes voyages, j’ai acquis la confiance que les histoires que j’écris et que je présente au festival reflètent les expériences partagées par des personnes de races et de cultures diverses.
Mon premier voyage en dehors du Kenya a eu lieu en Ouganda pour une mission chrétienne, ce qui m’a aidé à apprécier les similitudes et les différences entre les cultures voisines. Cependant, c’est mon séjour au Royaume-Uni pour mes études qui a eu le plus d’impact. Pendant mon séjour là-bas, j’ai rencontré des gens de presque toutes les régions du monde, ce qui m’a exposé à un large éventail de visions du monde, d’histoires, de pratiques religieuses et de modes de vie. Cette expérience m’a fait réaliser que certaines approches narratives sont trop étroites pour toucher un public mondial, tandis que d’autres sont trop larges et déconnectées pour trouver un écho profond auprès de quiconque.
Par conséquent, je commence maintenant par ma communauté locale comme point de comparaison et de contraste. Cela me permet d’établir un lien plus personnel et plus accessible avec mon public, en représentant leurs expériences avec honnêteté sans perdre les liens universels qui rendent les histoires significatives pour un public mondial.

Jombelek : Quel pays ou quelle ville a le plus inspiré votre travail, et pourquoi ?
Peter B. : Londres et le Royaume-Uni ont été les endroits les plus inspirants pour mon travail. Non seulement j’y ai passé plus de temps que partout ailleurs en dehors du Kenya, mais la culture cinématographique dynamique et expansive du Royaume-Uni m’a ouvert de nouveaux mondes de créativité et d’opportunités.
Ce qui a vraiment transformé mon expérience au Royaume-Uni, c’est le lien plus profond que j’ai développé avec le cinéma africain. J’ai appris plus sur le cinéma africain pendant mon séjour là-bas que je n’en ai jamais appris en Afrique. Le Royaume-Uni est un carrefour pour les professionnels du cinéma africain : beaucoup d’entre eux s’y rendent ou y travaillent, apportant avec eux des perspectives et une expertise diverses. Que ce soit dans l’industrie ou dans les cercles universitaires, je me suis retrouvé entouré de personnes qui partageaient des connaissances inestimables sur le cinéma africain, suscitant de nouvelles idées et des conversations auxquelles je n’aurais pas eu accès chez moi.
Les connaissances que j’ai acquises pendant mes études au Royaume-Uni ont changé la donne. Apprendre de David Salas comment organiser des événements de cinéma éphémères m’a aidé à comprendre à quel point le cinéma peut être un outil puissant pour mobiliser et connecter les communautés locales. Ces leçons, combinées à ma formation dans le secteur cinématographique, m’ont donné une solide compréhension de la façon d’équilibrer les aspects artistiques et commerciaux de la réalisation cinématographique, une compétence essentielle pour naviguer dans l’industrie.
Ce qui ressort le plus, cependant, c’est la façon dont le Royaume-Uni m’a aidé à comprendre le contexte mondial plus large du cinéma africain. Le mélange des cultures, la grande diversité et l’échange dynamique d’idées à Londres m’ont poussé à penser au-delà des frontières, à la manière dont les histoires africaines résonnent à l’échelle mondiale et à la manière dont les récits locaux peuvent relier les cultures. C’est à Londres que j’ai vraiment vu le potentiel du cinéma africain pour atteindre de nouveaux publics et créer de puissantes collaborations interculturelles. Cette expérience a influencé à jamais ma façon d’aborder la réalisation de films, la narration et le processus créatif.

Jombelek : Quelles différences culturelles ont enrichi votre perspective cinématographique ?
Peter B. : Voyager dans des pays comme les États-Unis, la France, le Sénégal, le Zimbabwe, le Nigéria, le Rwanda, l’Ouganda et l’Afrique du Sud a profondément enrichi ma perspective cinématographique. Chaque culture que j’ai rencontrée m’a offert des perspectives uniques sur la narration, m’aidant à apprécier la diversité des expériences humaines.
En particulier, l’exposition aux cultures africaines au-delà du Kenya, ainsi qu’aux perspectives européennes et américaines, m’a montré la richesse des récits locaux et l’importance de l’authenticité. Par exemple, interagir avec la diaspora africaine dans différents pays m’a révélé comment l’histoire et l’identité façonnent la narration de diverses manières.
Ces différences culturelles m’ont incité à aborder la réalisation de films avec ouverture et curiosité, en veillant à capturer et/ou à montrer des histoires avec respect et profondeur tout en les rendant pertinentes à l’échelle mondiale. Chaque expérience m’a appris à mélanger l’authenticité culturelle avec des thèmes universels, ce qui rend mon travail plus percutant auprès de publics divers.

Jombelek : Comment garantissez-vous le respect culturel et l’authenticité lorsque vous travaillez dans des environnements divers ?
Peter B. : D’après mon expérience de travail dans les communautés kenyanes et africaines, la diversité est liée à la vaste gamme de langues, de traditions et d’histoires à travers le continent, et moins à la race comme on le voit dans plusieurs autres endroits. Lorsque je travaille dans différentes communautés, je pense qu’il est essentiel de m’immerger dans leurs cultures uniques et de m’engager auprès des voix locales pour vraiment comprendre leurs points de vue. À la Kitale Film Week, je me fais un devoir de collaborer étroitement avec les cinéastes locaux et les dirigeants communautaires, en veillant à ce que les histoires que nous présentons soient à la fois authentiques et respectueuses. Je pense qu’il s’agit de favoriser un environnement où la communauté se sent vue et entendue, et où chaque histoire est racontée avec intégrité.

Collaboration et croissance de l’industrie

Jombelek : Quelle est l’importance de la collaboration dans la réalisation cinématographique, en particulier entre les cultures et les industries ?
Peter B. : La collaboration est la clé du succès de la réalisation cinématographique, en particulier lorsque l’on travaille dans différentes cultures et industries. À la Kitale Film Week, les partenariats jouent un rôle crucial. Tunga Media Afrika nous a facilité la gestion du programme de cinéma dans l’éducation pour les étudiants, tandis que Docubox a été essentiel pour l’organisation de projections en plein air. Les collaborations avec les cinéastes nous aident à proposer des masterclasses qui élèvent les compétences des talents locaux.
La collaboration avec des cinéastes ougandais et internationaux apporte des histoires et des langues diverses, enrichissant ainsi l’offre du festival. Les entreprises locales apportent également leur expertise technique et aident à intégrer des aspects de la vie communautaire dans l’industrie cinématographique, garantissant que notre travail est pertinent et a un impact à la fois au niveau local et mondial. Ces collaborations sont essentielles pour créer un écosystème cinématographique plus dynamique et plus inclusif.

Jombelek : Quelles qualités recherchez-vous chez les collaborateurs, qu’ils soient réalisateurs, acteurs ou producteurs ?
Peter B. : Pour moi, la qualité la plus importante chez un collaborateur est une véritable croyance dans la vision du projet. J’aime travailler avec des personnes qui partagent une passion similaire et qui sont enthousiastes à l’idée de contribuer à donner vie à l’histoire. Au-delà de cela, j’apprécie la gentillesse et l’ouverture d’esprit. Je recherche des collaborateurs avec lesquels je peux établir une relation personnelle, car je crois que le meilleur travail naît d’un climat de confiance et de respect mutuel. Lorsque nous pouvons nous comprendre sur le plan humain, tout le processus devient plus agréable et plus épanouissant. En fin de compte, il s’agit de créer un environnement positif et solidaire où chacun se sent valorisé et inspiré.

Jombelek : Comment les coproductions internationales peuvent-elles renforcer l’industrie cinématographique mondiale ?
Peter B. : Les coproductions internationales peuvent renforcer considérablement l’industrie cinématographique mondiale en favorisant la collaboration au-delà des frontières et des cultures. De nombreux cinéastes émergents, en particulier en Afrique, sont impatients d’explorer les opportunités de coproduction mais ne savent souvent pas où les trouver. En créant des plateformes ou des portails spécialement conçus pour connecter les cinéastes de différentes régions, nous pouvons combler le fossé et créer davantage d’opportunités de collaboration transfrontalière.
Les coproductions permettent aux cinéastes de combiner les ressources, le talent et l’expertise de plusieurs pays, améliorant ainsi la qualité des productions tout en ouvrant des canaux de distribution plus larges. Par exemple, les cinéastes africains qui collaborent avec des studios internationaux peuvent avoir accès à des techniques de production avancées, tout en faisant connaître leurs récits culturels uniques à un public mondial. Ces collaborations élargissent non seulement la portée des histoires locales, mais créent également un paysage cinématographique plus diversifié et plus inclusif, enrichissant l’industrie cinématographique mondiale de nouvelles perspectives et voix.
En facilitant la recherche de partenaires de coproduction pour les cinéastes émergents, nous pouvons encourager davantage de projets internationaux qui trouvent un écho auprès d’un public plus large, renforçant ainsi à la fois les industries locales et la communauté cinématographique mondiale.

Jombelek : Quelles mesures les cinéastes devraient-ils prendre pour promouvoir la compréhension culturelle à travers leur travail ?
Peter B. : En tant que distributeur de films et directeur de festival, je pense que les cinéastes peuvent promouvoir la compréhension culturelle en s’immergeant d’abord dans les cultures qu’ils souhaitent représenter. Les cinéastes doivent faire des recherches approfondies, s’engager auprès des communautés locales et écouter les voix de ceux dont ils racontent l’histoire. L’authenticité est essentielle : les films doivent représenter les cultures avec précision et respect, en évitant les stéréotypes ou les fausses représentations.
Les cinéastes doivent également créer des opportunités de collaboration entre les cultures, à la fois au sein de l’industrie cinématographique et avec les communautés qu’ils représentent. En travaillant avec des talents, des écrivains et des experts locaux, les cinéastes s’assurent que le récit reflète la véritable essence de la culture tout en enrichissant le processus de narration.
De plus, les festivals et les projections, comme ceux que nous organisons à la Kitale Film Week, jouent un rôle essentiel dans la promotion des échanges culturels. La diffusion de films divers provenant de différentes régions d’Afrique et du monde permet au public de se rapprocher de cultures inconnues et de comprendre des thèmes universels qui nous unissent tous.
En fin de compte, les cinéastes devraient considérer leur travail comme un pont entre différentes cultures. En favorisant le respect, en engageant un véritable dialogue et en se concentrant sur les expériences humaines partagées, ils peuvent contribuer à une compréhension et une appréciation plus profondes des diverses cultures du monde.

FrançaisRegard vers l'avenir

Jombelek : Où vous voyez-vous dans l'industrie cinématographique dans les cinq à dix prochaines années ?
Peter B. : Dans les cinq à dix prochaines années, je me vois avoir fait de la Kitale Film Week un événement majeur du calendrier cinématographique africain, tout en ayant joué un rôle clé dans la construction de Kitale en tant que Ville créative du cinéma de l'UNESCO. Cette initiative transformera Kitale en un centre de culture et de production cinématographiques, attirant des cinéastes, des professionnels de l'industrie et des touristes pour découvrir la richesse du cinéma africain.
En outre, j'envisage de m'établir fermement dans le secteur de la distribution de films, de promouvoir les films africains à l'échelle mondiale et de créer des opportunités de partenariats internationaux.
Enfin, j'ai pour objectif de produire 2 ou 3 films importants qui non seulement mettent en valeur les histoires africaines mais repoussent également les limites de l'expression créative, contribuant ainsi davantage au développement du cinéma africain.

Jombelek : Quel héritage espérez-vous laisser derrière vous grâce à votre travail dans le cinéma ?
Peter B. : À travers mon travail dans le cinéma, je veux laisser derrière moi un héritage d'autonomisation, de connexion et d'appréciation culturelle. En faisant de la Semaine du film de Kitale un événement phare du calendrier cinématographique africain et en développant davantage Kitale en tant que Ville créative du cinéma de l’UNESCO, j’ai pour objectif de créer des plateformes durables qui nourrissent les cinéastes africains et célèbrent nos histoires sur la scène mondiale.
J’aspire également à jouer un rôle important dans la distribution de films, en veillant à ce que les films africains atteignent un public mondial et que le cinéma africain soit reconnu comme partie intégrante de l’industrie cinématographique mondiale. Grâce à ces initiatives, je souhaite contribuer à la croissance d’une industrie cinématographique florissante et durable en Afrique qui met en valeur nos voix uniques et facilite la collaboration internationale et les échanges culturels.
En fin de compte, mon héritage sera celui de la promotion de la créativité, de la communauté et de la compréhension interculturelle, laissant un impact durable sur le cinéma africain et créant un avenir où des histoires diverses sont partagées et appréciées par le public du monde entier.

Conclusion

Le parcours de Peter Bwire témoigne du pouvoir de la persévérance, de la passion et d’une profonde croyance dans le potentiel du cinéma africain. Son engagement à nourrir les talents locaux tout en établissant des liens mondiaux met en évidence l’équilibre délicat entre l’authenticité culturelle et la collaboration internationale. Son travail démontre que le cinéma est plus qu’un divertissement : c’est un outil de préservation culturelle, de changement social et de développement économique. Sa vision de l’avenir est claire : voir les histoires africaines racontées de manière authentique, partagées à l’échelle mondiale et célébrées universellement.

Entretien réalisé par Johanne Elie Ernest Ngo Mbelek alias Jombelek
Paris (France), 12 décembre 2024
jombelek@gmail.com
+330751322895


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