Bénin/PDIEM : un partenariat exemplaire entre le Bénin, la Coopération suisse et la SNV pour transformer les communes par l’éco-construction

Publié le 26/08/2025 | La rédaction

Bénin

Alors que la décentralisation bat son plein depuis 2003, une réponse innovante à l’insuffisance des infrastructures économiques et marchandes dans les communes béninoises voit le jour en 2013 : la construction des IEM en matériaux locaux. Un pari audacieux, porté par la Coopération suisse et le gouvernement du Bénin à travers le PDIEM, et qui, plus d’une décennie après, révolutionne le paysage du BTP local.

Malgré la signature du décret n°2005-482 du 4 août 2005 imposant l’utilisation d’au moins 25 % de matériaux locaux dans les constructions publiques, sa mise en œuvre reste largement timide. Une situation paradoxale, compte tenu de la richesse du Bénin en matériaux locaux comme la terre crue, et de leur efficacité éprouvée dans les pays voisins.

Pour briser cette inertie, la Coopération suisse s’est engagée à travers le Programme de Développement des Infrastructures Économiques et Marchandes (PDIEM) à promouvoir l’éco-construction dans 24 communes. Son objectif : valoriser les ressources locales tout en stimulant les économies communales et en encourageant la création d’emplois durables.

Une stratégie structurée de transfert de compétences

Consciente du déficit d’expertise dans le domaine de la construction en matériaux locaux, la Coopération suisse a déployé un plan rigoureux de renforcement des capacités. Dès la phase 1 du PDIEM, architectes, ingénieurs, artisans et techniciens ont été formés aux techniques de production et de pose des briques de terre comprimée (BTC) et moellons, grâce à l’appui de formateurs venus du Togo et du Burkina Faso.

Pour Baky Lafia Mora, chef projet adjoint du PDIEM phase 3, « en phase 1, les artisans s’étaient bien débrouillés, mais les conceptions architecturales posaient problème. D’où la nécessité d’élargir la formation aux prescripteurs tels que les architectes et les ingénieurs. »

En 2019, une session de six semaines intensives est organisée à Lomé en partenariat avec l’École Africaine des Métiers de l’Architecture et de l’Urbanisme (EAMAU), l’École Polytechnique d’Abomey-Calavi (EPAC), et le CRATerre de Grenoble, référence mondiale en construction en terre.

Au total, 31 prescripteurs (ingénieurs, architectes, techniciens) ont bénéficié de cette formation alliant théorie et pratique, suivie de stages professionnels auprès de bureaux d’études agréés. « Ce stage a été une vraie immersion. J’ai pu appliquer mes acquis dans les études et le suivi de chantiers d’IEM », témoigne José Tossou, ingénieur en génie civil et bénéficiaire de la formation.

Une dynamique inclusive : les femmes et les jeunes en première ligne

Au cœur de cette initiative, l’inclusion des jeunes et des femmes reste une priorité. Vingt femmes ont été formées à la production de BTC, quinze autres ont été recrutées comme contrôleuses de qualité, et huit groupements féminins, regroupant 400 entrepreneures, ont été renforcés pour fournir du gravier aux chantiers.  L’approche du PDIEM, volontairement inclusive, contribue à la transformation sociale et économique des communautés locales. L’exemple des concasseuses de Sérèkali ou encore des jeunes femmes formées au contrôle qualité témoigne de cette volonté de changement de paradigme.

Pour garantir une main-d’œuvre locale qualifiée et renforcer les Groupements de Très Petites Entreprises (GTPE), des ateliers de co-construction des Dossiers d’Appel d’Offres (DAO) ont été menés avec les associations de communes (ACAD, APIDA, ADECOB) et les communes bénéficiaires.

Des clauses spécifiques sur l’emploi local, le tâcheronnat et la sous-traitance ont été introduites dans les marchés publics pour favoriser l’implication directe des GTPE dans l’exécution des ouvrages, assurant ainsi une redistribution équitable des retombées économiques.

Une éco-construction au service du climat et du développement durable

Au-delà de l’enjeu économique, la promotion des matériaux locaux répond à des préoccupations écologiques : réduction de l’empreinte carbone, confort thermique, gestion durable des ressources, économie d’énergie. Les infrastructures construites à base de BTC contribuent ainsi à l’atténuation des effets du changement climatique, tout en garantissant des performances techniques et une esthétique en harmonie avec le patrimoine local.

Avec le PDIEM, la Coopération suisse ne se contente pas de construire des bâtiments. Elle bâtit une nouvelle vision du développement local, ancrée dans les réalités du terrain, durable, inclusive et profondément transformative. Le pari de l’éco-construction en matériaux locaux au Bénin, autrefois marginal, devient peu à peu une norme à suivre.

 


Vous avez aimé cet article ? Partagez-le ...

commentaires

Laisser un commentaire

Votre commentaire sera publié après validation.