Canada/La première usine de compost officiellement ouverte à Montréal

Publié le 21/10/2024 | La rédaction

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La première usine de compost de Montréal ouvre officiellement ses portes lundi, bien qu’elle soit en rodage depuis plusieurs mois. Radio-Canada a eu accès aux installations dernier cri attendues depuis 15 ans, qui revalorisent les restes de table des citoyens en « or brun » aux mille vertus.

C’est presque 25 % de la population de Montréal qui verront leur matière organique traitée localement, explique Marie-Andrée Mauger, responsable de la transition écologique et de l’environnement à la Ville de Montréal.

On va pouvoir redistribuer [le compost] aux Montréalais, la ville va pouvoir l'utiliser dans ses parcs et il va servir à la vente pour l’agriculture, énumère celle qui est aussi mairesse de Verdun

Le centre de compostage flambant neuf, construit par la multinationale française Veolia au coût de 169 millions de dollars, est situé sur le boulevard Henri-Bourassa Ouest dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Il dessert les arrondissements et les villes liées de l’ouest de l’île, avec une capacité de traitement annuel de 50 000 tonnes de matières organiques, autant des restes alimentaires que des résidus de jardin.

Pour faire image, c’est l’équivalent de 12 piscines olympiques remplies de cœurs de pomme, de feuilles mortes ou encore de pelures de bananes.

Avec cette matière, l’usine produira jusqu’à 20 000 tonnes de compost de catégorie A chaque année. Comme le taux de contamination se situe sous la barre du 1 %, cet or brun peut être épandu sans risque dans les champs.

À l’heure actuelle, la plus grande portion des matières résiduelles des Montréalais est transportée par camion en Ontario ou à Joliette, dans Lanaudière, parcourant jusqu’à 190 kilomètres environ avant d’être traitées. Grâce à cette nouvelle usine, la distance parcourue chute à six kilomètres, se réjouit l’ingénieur Alexis Caron-Dionne, chef de section au service de l’environnement de la Ville.

Et les odeurs? Le voisinage n’a rien à craindre, assure-t-il. L’usine est complètement étanche, fait rare pour ce genre d’installations au Québec, équipée, qui plus est, d’un système de ventilation à la fine pointe de la technologie.

Des semaines de travail

Le centre de compostage fonctionne à toute heure du jour et de la nuit grâce à des installations automatisées. La vingtaine d’employés qui y travaillent sont notamment chargés de recevoir les camions-bennes sillonnant l’ouest de la ville pour récupérer le contenu des bacs bruns.

À leur arrivée, ces camions sont pesés puis redirigés vers l’une des quatre grandes portes du centre prévues à cet effet. Celles-ci débouchent sur un passage clos dans lequel la seconde porte ne peut s’ouvrir que si la première est fermée. On veut vraiment garder l’air à l’intérieur du bâtiment, explique Alexis Caron-Dionne.

Les camions vont ensuite décharger les matières résiduelles sur le plancher de l’usine, où elles seront récupérées pour être acheminées sur un convoyeur. Les matières seront broyées, nettoyées de leurs contaminants et mélangées en respectant des paramètres très précis.

Une des caractéristiques du centre, c’est qu’on peut retirer de petites particules de plastique pour s’assurer d’avoir un compost qui sera sans restriction d’usage, se félicite l’ingénieur, appelant tout de même les citoyens à utiliser des sacs de carton pour disposer de leurs restes de table.

La matière organique sera ensuite transférée pendant trois semaines dans des tunnels de béton, pour qu'elle puisse se décomposer tout en étant aérée, et perdre son odeur putride. Vient finalement la dernière étape : celle de la maturation, pendant laquelle le mélange est transféré dans une autre zone du centre où il va reposer pendant quatre semaines.

On obtient un terreau pratiquement, avec une certaine humidité et une odeur agréable, indique l'ingénieur Alexis Caron-Dionne. Durée totale du parcours d’un trognon de pomme entre les murs du centre de Saint-Laurent? De huit à neuf semaines.

Des Montréalais boudent le bac brun

Avec ce centre de compostage inauguré en grande pompe lundi, l’administration Plante espère motiver la population à participer davantage au compostage. Si huit résidences sur dix sont desservies par la collecte municipale de compostage, seul le tiers des Montréalais (35 %) qui a accès à un bac brun ou à un sac de compostage s’en sert régulièrement, selon les données de la Ville.

On a besoin de donner une poussée dans la participation, reconnaît Marie-Andrée Mauger, alors que la Ville vise un taux de 60 % d’ici 2025. Nos sites d’enfouissement se remplissent à vitesse grand V, relève-t-elle, en référence notamment au seul centre d’enfouissement de la région de Montréal qui aura atteint sa pleine capacité d'ici 2029.

La moitié de notre sac poubelle est composé de matière organique. Quand cette matière organique se retrouve dans les sites d’enfouissement, elle crée beaucoup de gaz à effet de serre. Elle génère du méthane et du lixiviat, qui est un liquide toxique.

Une citation de Marie-Andrée Mauger, responsable de la transition écologique et de l’environnement à la Ville de Montréal

Celle-ci rappelle que la collecte des matières organiques – à l’instar du recyclage – n’est pas facultative, mais obligatoire à Montréal, bien que la Ville sévit très peu auprès des contrevenants. Des amendes maximales de 2000 $ pour une première infraction et de 4000 $ pour une récidive sont prévues.

Une facture plus élevée

Cette usine de compost à Saint-Laurent est dans les cartons de la Ville depuis une quinzaine d’années. L’annonce de sa construction remonte à l’administration de Gérald Tremblay, qui voulait construire cinq usines de traitement des matières compostables pour un coût total estimé en 2013 à 237 millions $.

En 2019, la Ville avait décidé de retenir deux projets, soit l’usine de Saint-Laurent et celle de biométhanisation de Montréal-Est, qui doit voir le jour au cours des prochains mois. Les imprévus et les retards ont fait gonfler la facture de 163,8 à 169 millions $ dans le cas du centre de traitement de Saint-Laurent.

Quant à l’usine de l’est, le montant final n’est pas encore connu. Toutefois, la vérificatrice générale de Montréal, Michèle Galipeau, s’inquiétait en 2021 d’une explosion des coûts, reprochant à l'administration Plante son manque de rigueur dans la gestion du dossier.

La facture du projet pourrait être de près de deux fois ce qui avait été prévu six ans plus tôt pour les cinq infrastructures, alors que seulement deux seront réalisées, pouvait-on lire dans son rapport.

En mai 2023, la Ville de Montréal a conclu un accord avec l'entreprise Veolia après avoir allongé 40 millions de plus pour les deux projets et accepté de ne pas lui charger 5,4 millions en frais de retard. Les chantiers étaient alors paralysés en raison d’un conflit commercial.

À l’échelle du Québec, 16 projets de traitement des matières organiques par biométhanisation ou compostage ont reçu de l’argent du gouvernement pour aller de l’avant. De ce nombre, 11 sont en exploitation.

Source:    ici.radio-canada.ca/


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