Au Sénégal, une Tchèque construit des maisons avec des bouteilles en plastique

Publié le 12/01/2022 | La rédaction

Sénégal

A l’initiative de Lucie Masopustová, le projet de constructions en bouteilles en plastique Yagana Lucky Zone vise à créer un lieu de rencontres hors des sentiers battus, tout en sensibilisant au recyclage des déchets au Sénégal.

Dans un village situé sur la côte atlantique, trois bâtiments couverts et construits à partir de bouteilles en plastique ont déjà vu le jour, et à terme, le terrain devrait en compter six. Le principe moteur du projet Yagana Lucky Zone étant d’offrir aux visiteurs étrangers la possibilité de découvrir la vie des Sénégalais en-dehors des circuits touristiques ; par ailleurs, les petites maisons ainsi construites pourraient servir à l’organisation de divers ateliers artistiques ou autres et, à l’avenir, un hébergement y sera également proposé.

Baroudeuse, Lucie Masopustová a parcouru le monde avant de tomber amoureuse du Sénégal et, par la même occasion, d’être frappée de stupeur à la vue des déchets plastique abandonnés partout dans la nature. C’est à ce moment-là qu’est née l’idée de son projet :

« Après un atelier de percussion et de danse au Sénégal, j’ai passé un mois et demi à voyager dans le pays. Mon guide était sénégalais ; nous avons donc énormément voyagé en-dehors des zones touristiques. Et je dois dire que constater à quel point la nature était enlaidie par les déchets plastiques qui traînaient partout a été pour moi une vraie désillusion... C’est là qu’est née l’idée. Je connaissais l’existence des constructions en bouteilles en plastique, il y en a partout dans le monde, et même dans plusieurs pays d’Afrique, mais je n’en ai pas trouvé de trace au Sénégal. Et donc, lorsque je suis revenue au Sénégal l’année suivant ce séjour, je me suis dit qu’il fallait tenter le coup. »

Après quelques péripéties administratives, Lucie Masopustová est parvenue à acquérir un terrain de 2000 m2 dans un village nommé Abéné, dans la région historique et naturelle de la Casamance. Un village qu’elle apprécie personnellement parce qu’il compte de nombreux musiciens parmi ses habitants. La construction du premier bâtiment en bouteilles en plastique y a débuté en 2019. Lucie Masopustová explique le processus de construction :

« Quelque 5000 à 6000 bouteilles en plastique sont nécessaires pour la construction d’une seule maison. C’est plus de travail que je ne l’aurais pensé, car il faut tout d’abord remplir de sable chacune de ces bouteilles. Mais maintenant que nous nous sommes lancés, nous devons aller jusqu’au bout ! Nous employons des gens d’ici pour le remplissage, et des maçons pour la construction. Pour ce qui est de l’achat des matériaux de construction autres que les bouteilles et le sable, ce n’est pas comme en Europe, où il suffit de se rendre à l’entrepôt d’un fournisseur. Le ciment, on peut le commander dans le village, il suffit ensuite d’attendre qu’on nous le livre. Pour le bois, qui sert de moule pour les murs, mais aussi pour la fabrication des portes, c’est très compliqué. Il faut se rendre à la scierie de la ville voisine, convenir de l’achat avec quelqu’un sur place, et lorsque la quantité n’est pas suffisante, il faut aller voir ailleurs... La fabrication des portes, par ailleurs, a pris deux semaines. Pour finir, le menuisier les a fabriquées directement sur place, dans notre jardin. Il n’y a pas l’électricité, donc l’intégralité de cette construction est réalisée sans aucun des outils électriques dont nous avons l’habitude en Europe. »

Les bouteilles collectées sont donc remplies de sable, puis empilées horizontalement – comme on le ferait avec des briques – et jointoyées avec du ciment pour former des murs solides. Un toit et des huisseries sont ensuite ajoutés aux constructions, qui ont une forme ronde et une surface de 3 à 4 m2, ce qui selon, Lucie Masopustová, est suffisant : au Sénégal, en effet, la vie a beaucoup lieu à l’extérieur.

Quant au regard des habitants du village sur ce projet qui peut sembler un peu fou, Lucie Masopustová relativise :

« Le copropriétaire du terrain est originaire d’ici. Il s’appelle Bacary Sagna, et après que je lui aie montré des vidéos sur des constructions en bouteille en plastique dans le monde entier, il s’est enthousiasmé pour le projet. Il en est devenu la mascotte, en quelque sorte. Il récupère ce dont les autres se débarrassent, et je crois qu’ils le prennent un peu pour un fou lorsqu’il affirme qu’il va utiliser ces déchets pour construire des maisons. Mais nous verrons bien avec le temps ; peut-être que quelqu’un sera inspiré par notre projet, et tentera également d’utiliser des déchets pour construire des maisons. »

 

Si la pandémie de Covid-19 a retardé la construction, notamment en raison des restrictions limitant le déplacement des ouvriers et le transport des matériaux, Lucie Masopustová a suivi l’avancée des travaux depuis la République tchèque, par les vidéos et les nouvelles envoyées par son associé. Elle se réjouit de reprendre en janvier l’avion pour le Sénégal, et a déjà quelques nouvelles idées en tête – notamment la mise en place d’un système de compostage, ainsi que la construction de toilette sèches à séparation d’urine.

Tout sur le projet : https://yaganaluckyzone.cz/

Source:    francais.radio.cz

 

 


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